KENT FARRINGTON REMPORTE LE TROPHÉE DE GENÈVE POUR LA SIXIÈME FOIS
La magnifique ville de Genève a encore une fois accueilli les couples cheval-cavalier les plus talentueux au monde à l’occasion du CHI de Genève, parfois considéré comme le plus grand événement équestre indoor de la planète. Décor du dernier Majeur du Rolex Grand Slam of Show Jumping de l’année, ce concours a débuté hier et s’est poursuivi aujourd’hui avec sa première épreuve internationale 5*.
Au total, c’est 48 couple qui se sont présentés au départ du Trophée De Genève, événement phare de la journée. Cette épreuve à 1,60 m était également la première opportunité pour les cavaliers de se qualifier pour le Rolex Grand Prix de dimanche. Comme souvent au CHI de Genève, la liste des cavaliers comprenait de nombreux grands noms du saut d’obstacles, dont Ben Maher, Henrik von Eckermann et Steve Guerdat, respectivement champion olympique, champion du monde et champion d’Europe actuels.
Premiers à fouler l’emblématique piste du Palexpo, l’irlandais Shane Sweetnam et son hongre alezan Cjoxx Z produisent un impeccable sans faute malheureusement mitigé d’une faute de temps. Quatrième au départ, Vitor Bettendorf, déjà gagnant de deux épreuves aujourd’hui, est le premier à se qualifier pour le barrage, bientôt suivi du Suisse Pius Schwizer sous les acclamations de la foule. À mi-course, huit cavaliers avaient évité la faute, ce qui n’était pas le cas de nombreux sur ce parcours très bien pensé.
Après la pause, le public a pu admirer sept autres couples réaliser le sans faute. Parmi ces cavaliers exceptionnels se trouvaient Kent Farrington, déjà victorieux dans cette même épreuve il y a deux ans, ainsi que l’Allemand Christian Kukuk et le Suisse Elian Baumann. Mais le public helvète a aussi eu son lot de déception : Steve Guerdat et Martin Fuchs, Prétendant actuel au Rolex Grand Slam of Show Jumping, se sont vus éliminer après avoir tous deux fini avec des points de pénalité.
Au total, 15 cavaliers décrochent une place pour le barrage après avoir bouclé le parcours de Gérard Lachat sans aucune faute pour aller se présenter dans le même ordre qu’à la première manche. Après un second sans faute, le luxembourgeois Bettendorf impose un chrono à battre de 38,63 secondes, mais la tête du classement ne cessera ensuite de changer. Harry Charles, numéro un chez les moins de 25 ans, passe près de décrocher sa première victoire au CHI de Genève en 37,08 secondes. Mais Kent Farrington, autre Témoignage Rolex, enflamme les cœurs en passant la ligne d’arrivée avec 2,31 secondes d’avance sur Charles. Et les cinq chevaux suivants ne parviendront pas à battre le chrono éblouissant de Toulayna, l’exceptionnelle jument de Farrington. Pour la deuxième fois en trois ans, ce dernier emportera chez lui aux États-Unis le Trophée de Genève.
Ravi de la performance de sa jument, âgée de neuf ans seulement, Farrington s’est exclamé après sa victoire : « Je suis très content d’elle. J’ai amené deux jeunes chevaux avec moi cette semaine, car ils offraient de belles perspectives. J’avais pour tactique de gagner. Je voulais offrir à ma jument une expérience positive, mais c’est tout de même l’un des plus grands concours au monde, et je voulais me montrer compétitif. »
L’Américain peut désormais tourner le regard vers le Rolex Grand Prix de dimanche : « Je suis très heureux ce soir, mais demain est un autre jour et il reste beaucoup à faire. J’ai hâte ! »
Et à Denise Moriarty, la groom de Toulayna, de rajouter : « Je suis très fière d’elle. Elle est toujours partante. Elle fait tout ce qu’on lui demande, et elle le fait bien. Même si elle n’a que neuf ans, elle est très fiable, et son avenir est prometteur. Elle a très bien voyagé depuis les États-Unis. Elle est très relax en général, jusqu’au moment où elle entre en piste. »
ENTRETIEN AVEC SOPHIE MOTTU MOREL, ORGANISATRICE DU CONCOURS
Comment s’est passée l’organisation cette année ?
Tout s’est bien passé. Nous avions commencé à réfléchir au calendrier sportif et à planifier nos communications dès février. Nous sommes très heureux de fêter le dixième anniversaire du Rolex Grand Slam of Show Jumping : nous recevrons pour l’occasion une grand nombre d’excellents cavaliers et aurons le plaisir d’accueillir une fois encore une foule de passionnés de sports équestres.
Le CHI de Genève nous réserve-t-il des surprises cette année ? Et y aura-t-il des événements spéciaux pour fêter le dixième anniversaire du Rolex Grand Slam of Show Jumping ?
Samedi soir à 21 h aura lieu une cérémonie sur la piste principale en l’honneur de Steve Guerdat, qui a participé à tous les Majeurs du Rolex Grand Slam of Show Jumping. Nous voulions le mettre à l’honneur pour cet incroyable tour de force. Pour la première fois, un brunch a également été organisé pour les grooms, qui jouent un rôle absolument crucial dans notre sport. Il était important à nos yeux de les remercier pour leur dur labeur. Et enfin, d’autres activités plus modestes marqueront les dix bougies du Rolex Grand Slam.
Quelle importance ont les bénévoles dans le bon déroulement de la compétition ?
Ils sont au cœur-même de toutes nos activités. C’est grâce à eux que le concours est aussi populaire. Leur passion se ressent dans tout ce qu’ils font, et nous leur sommes très reconnaissants pour leur générosité et leur enthousiasme.
Les jeunes cavaliers sont toujours sous le feu des projecteurs au CHI de Genève. Pourquoi choisissez-vous chaque année de leur faire la part belle ?
Car ce sont les stars de demain ! Nous souhaitons leur offrir l’opportunité de concourir dans le même cadre que les meilleurs cavaliers au monde. Les épreuves pour jeunes cavaliers sont une composante essentielle du concours, qui permet de leur donner l’expérience nécessaire à leur développement.
Le Rolex Grand Slam of Show Jumping souffle ses dix bougies. Cette initiative a-t-elle eu un effet positif sur le CHI de Genève ?
Bien sûr, elle a eu un impact extraordinaire. Grâce à elle, les quatre concours du Grand Slam ont vraiment monté la barre. C’est très important d’avoir ce type de grand chelem pour le saut d’obstacles. Le CHI de Genève est très fier d’en faire partie. Le Rolex Grand Slam of Show Jumping a permis de mieux faire connaître le saut d’obstacles auprès d’un public qui n’en avait pas forcément beaucoup entendu parler avant. Après tout, les complexités de ce sport ne sont pas toujours très faciles à comprendre. Mais avec le Rolex Grand Slam, c’est très simple : il comprend quatre grandes épreuves que tous les cavaliers de haut niveau souhaiteraient remporter.
Quel a été pour vous le moment le plus marquant de ces dix premières années du Rolex Grand Slam of Show Jumping ?
Il y en a tellement que c’est dur de choisir ! Mais je dirais la victoire de Steve [Guerdat] ici, au CHI de Genève, en 2013. C’était le premier Majeur que nous organisions, et la victoire d’un cavalier suisse était la cerise sur le gâteau.
Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un qui veut se lancer dans le secteur des événements sportifs ?
Il faut vraiment bien connaître le sport en question. Par exemple, j’aurais du mal à organiser un événement footballistique car je n’y connais pas grand chose, contrairement aux sports hippiques. Et puis, que ce soit pour un concert ou un événement sportif, il ne faut pas compter ses heures.
Il faut aussi entretenir de bonnes relations avec les parties prenantes extérieures, comme les autorités locales et les élus. Pour le CHI de Genève par exemple, la relation avec le canton de Genève est cruciale. Il faut aussi comprendre le côté financier, être polyvalent et faire preuve d’une certaine flexibilité, car on fait quelque chose de différent chaque jour. Enfin, il faut savoir gérer son stress, car on est parfois confronté à des situations difficiles dans lesquelles il est important de garder son calme.
Pour vous et l’équipe du CHIO de Genève, quels sont les éléments primordiaux d’un événement ou d’une épreuve réussi(e) ?
C’est d’abord le mélange entre les supporters, les médias et les sponsors. Il est important de créer une vraie communauté de fans et de bénévoles, un réseau solide avec les amoureux du CHI.
Il faut évidemment être en très bons termes avec les sponsors, car sans eux il n’y aurait pas de concours. Pour un événement réussi, il est donc vital d’avoir une relation privilégiée avec eux, de se montrer flexible et de savoir s’adapter à leurs besoins. On ne peut pas travailler en vase clos, il faut pouvoir sortir des schémas établis pour trouver une solution qui convient à tous. Le monde change rapidement et nous devons faire de même.
Il faut aussi être proche des athlètes, qui font partie des intervenants les plus importants du concours. C’est le bon équilibre entre tous ces éléments qui fait la réussite d’un événement sportif.
Les légendes du tennis telles que Nadal, Federer ou Djokovic, gagnent des titres de Majeurs de tennis à répétition. Pour vous, est-ce important de voir les meilleurs cavaliers mondiaux concourir à Genève ?
C’est très important pour les sponsors, qui veulent attirer les meilleurs concurrents. Du côté des communications aussi, pour vendre des entrées, il faut que les meilleurs cavaliers au monde viennent concourir, car le public veut les voir. Si les meilleurs sont absents, ce n’est pas catastrophique, mais leur présence confère au concours sa réputation. Et les bénévoles sont plus nombreux à se présenter, car ils sont fiers de participer à un événement aux prestigieuses têtes d’affiche.
Le CHI de Genève est considéré par beaucoup comme le meilleur endroit où voir des sports équestres en intérieur. Comment continuez-vous d’innover et de vous adapter pour maintenir cette réputation ?
Ce n’est pas facile ! Il y a beaucoup de superbes concours dans le monde. Pour rester au top, nous devons prendre un temps de réflexion chaque année afin de définir les éléments qui ont plus ou moins bien fonctionné. Tous les ans, nous organisons un débriefing qui rassemble les partenaires du CHI de Genève et tous les membres de l’équipe et qui vise à dégager les points à améliorer.
Plusieurs membres de notre comité d’organisation sont des bénévoles passionnés. Et qui dit passion dit motivation. Le comité organisateur est très fier du concours. Il écoute les retours et reste très ouvert aux critiques, pour pouvoir proposer le nec plus ultra. Il n’a pas peur de changer et de s’adapter. L’amour du cheval court dans nos veines, et c’est sûrement l’une des raisons du succès du CHI de Genève.
Vous et les autres organisateurs du CHI de Genève vous inspirez-vous de grandes compétitions d’autres sports, comme le tennis ou le golf ?
Oui, c’est très important d’assister à d’autres concours de saut d’obstacles, mais aussi à d’autres événements sportifs en général. Cela permet de voir ce que font les autres organisateurs, que ce soit de festival, de concert ou de compétition sportive, et d’en apprendre toujours plus.
On peut y puiser des idées transférables à son propre sport. Quand je le peux, j’essaie de me rendre à différents événements où je m’efforce toujours de parler aux organisateurs, de me rendre en coulisses et de demander leur avis à différents membres de l’équipe, de la billetterie à l’équipe com’ en passant par les agents de sécurité. Je me suis inspiré d’un festival en Suisse pour nos normes de sécurité, et notre système de billetterie nous vient d’un concert où je suis allé. Les événements sportifs télévisés peuvent aussi être une source d’inspiration.
Il faut rester ouvert et réfléchir à ce qui pourrait bien fonctionner au CHI de Genève. Certaines idées qui marcheraient en Allemagne par exemple ne sont pas adaptées en Suisse, en raison des différences culturelles. Mon conseil : voyagez, faites preuve d’observation et soyez ouvert au changement.
Pourriez-vous vous présenter ? Dites-nous par exemple pour qui vous travaillez et en quoi consiste votre métier.
Je m’appelle Lovisa Munter et je travaille pour Bertram Allen depuis trois ans en tant que groom de voyage.
Parlez-nous un peu de votre trajet jusqu’au CHI de Genève...
La semaine dernière, nous étions en concours à La Coruña, en Espagne. Nous nous sommes arrêtés en France sur le chemin pour laisser les chevaux se reposer, et j’en ai profité pour faire de même. Nous avons fini par arriver à Genève mardi soir.
Si un cheval n’aime pas voyager, que pouvez-vous faire pour l’aider et comment vous assurez-vous que vos chevaux voyagent dans de bonnes conditions pour être au meilleur de leur forme ?
Les deux chevaux de Bertram sont très habitués à la route, surtout Pacino Amiro. Ils ont aussi fait une pause de douze heures sur le chemin pour se reposer, avant d’arriver à Genève. Durant les déplacements, il faut absolument garder les mêmes horaires de repas pour les chevaux et tenter autant que possible de garder les mêmes habitudes. On arrête donc le camion à intervalles durant le voyage pour les nourrir et leur donner du mash. Ils ont aussi accès à des seaux d’eau et à des filets à foin dans le camion. J’ai tendance à ne prendre que deux chevaux dans le camion pour leur laisser de la place et pour qu’ils soient à l’aise pendant les déplacements.
Quelle est l’importance de toute l’équipe (vétérinaires, maréchaux-ferrants, etc.) pour assurer le succès de l’équipe ?
Elle est très importante. J’ai la chance de travailler au sein d’une équipe formidable. Le vétérinaire est super ; je l’appelle chaque semaine pour lui parler des chevaux. Bertram a aussi un maréchal-ferrant incroyable : les chevaux avec lesquels je travaille n’ont encore jamais eu de problèmes de pieds.
À l’écurie, Nathalie est la cavalière de plat responsable de Pacino [Amiro] et des autres meilleurs chevaux de Bertram. Elle fait un boulot fantastique. Kate, la groom qui s’occupe des chevaux à la maison, est extrêmement fiable. C’est elle que j’appelle toujours si j’ai besoin de conseils.
Parlez-nous des chevaux que vous avez emmenés avec vous et de leur personnalité…
Pacino Amiro, le meilleur cheval de Bertram, est formidable. Le concours de la semaine dernière était le cinquantième que nous faisions ensemble. Il est marrant, il se prend pour le roi de l’écurie. Il est parfois assez têtu, il a tendance à vouloir faire ce qu’il veut plutôt que ce qu’on lui demande.
L’autre cheval présent au CHI est Castigo De Amor. Il est nouveau ; il est arrivé il y a deux mois seulement, mais il a déjà gagné deux Grands Prix. C’est un étalon mais il a un très bon tempérament. On l’appelle la « petite licorne ». Il ne m’a jamais posé aucun problème.
Comment trouvez-vous les installations destinés aux chevaux et aux grooms au CHI de Genève ?
C’est la troisième fois que je viens. Le CHI de Genève est l’un des meilleurs concours au monde, tout le monde le dit. À l’arrivée, toute l’équipe du CHI est là pour vous aider à déballer et à préparer les boxes. Ces derniers sont spacieux et tranquilles. Tout est vraiment top.
Est-ce que vous aimez venir aux Majeurs (Dutch Masters, CHIO d’Aix-la-Chapelle, Spruce Meadows ‘Masters’, CHI de Genève) ? En quoi diffèrent-ils des autres compétitions selon vous ?
Les quatre Majeurs sont considérés comme les épreuves les plus prestigieuses au monde. Enfant, je rêvais de monter dans ce cadre, mais c’est déjà très spécial d’y assister en tant que groom. Les installations sont impeccables et l’atmosphère y est très agréable.
Cette année, je suis allée au CSIO Spruce Meadows ‘Masters’ pour la première fois, c’était génial. Je suis aussi déjà allée au CHIO d’Aix-la-Chapelle, le cadre est phénoménal ! Ces Majeurs sont les quatre épreuves que tous les cavaliers rêvent de remporter.
Bertram et vous êtes-vous confiants à l’approche du concours ?
Oui, Bertram est en bonne forme. Il a participé aux épreuves 5* à La Coruña la semaine dernière pour se préparer au CHI de Genève. Il a fait une bonne performance mais tout n’était pas parfait. On espère faire mieux cette semaine. D’habitude, il excelle sous la pression engendrée par les concours importants comme les Majeurs.
Quelle est la particularité de travailler dans l’équipe de Bertram ?
Travailler pour un cavalier aussi talentueux est un rêve devenu réalité. J’ai toujours adoré regarder Bertram en compétition : c’est l’un des cavaliers les plus rapides au monde et un excellent homme de cheval. Je suis très fière de travailler avec lui et avec ses montures.
Quelles sont les qualités de Bertram qui selon vous lui ont permis d’avoir une si longue carrière au sommet ?
Bertram peut monter n’importe quel cheval, et celui-ci fera tout pour lui faire plaisir, c’est incroyable ! Il a un talent très rare.
Quels conseil donneriez-vous à quelqu’un qui voudrait se lancer dans cette discipline ?
À mes débuts, je travaillais en Suisse et je n’allais qu’aux concours nationaux. J’ai fait mon apprentissage à l’écurie Stephex, dans le cadre d’une vraie équipe. C’est là que j’ai commencé à travailler avec plusieurs cavaliers et grooms très expérimentés. Cela a été l’opportunité d’observer d’autres travailler et de profiter de leur expérience. Une fois l’expérience nécessaire acquise, il faut être patient pour trouver le bon poste.
Est-ce que les grooms forment ensemble une vraie communauté dans laquelle ils se soutiennent mutuellement ?
Oui, et c’est très important d’avoir d’autres grooms avec qui se lier et qui peuvent vous aider. Beaucoup des mes amis les plus proches sont ici cette semaine. Tout le monde se soutient les uns les autres. Et pendant les longs trajets nocturnes au volant, c’est bien de pouvoir s’appeler. C’est ma deuxième famille. Je les vois d’ailleurs davantage que ma vraie famille !