Dans les coulisses de The Dutch Masters 2025: Dimanche 16 mars 2025

Une première pour la France : Delestre remporte le Rolex Grand Prix

Photo Credits : Rolex Grand Slam / Helen Cruden Photo Credits : Rolex Grand Slam / Helen Cruden

Toujours très attendu, le Dutch Masters est le premier Majeur du Rolex Grand Slam of Show Jumping de l’année. Il s’est conclu cet après-midi par son épreuve phare, le Rolex Grand Prix, auquel participaient 39 des meilleurs couples cheval-cavalier au monde.

Une atmosphère électrique les attendait sur la piste du Brabanthallen : en effet, la foule avait hâte de voir si Harrie Smolders, Prétendant au Rolex Grand Slam depuis sa victoire au dernier Majeur en date, serait en mesure de continuer son chemin vers cette récompense très convoitée. Mais la victoire ne serait pas donnée à tout le monde, et la concurrence serait même féroce : des cavaliers exceptionnels, dont Henrik von Eckermann, champion du monde en titre, Ben Maher, triple médaillé d’or olympique, et l’Américain Kent Farrington, en très bonne forme actuellement, tous bien décidés à gagner le prestigieux Rolex Grand Prix, étaient au rendez-vous.

Comme à son habitude, Louis Konickx a créé un parcours de 14 obstacles techniques et difficiles, destiné à mettre à l’épreuve la forme physique, l’endurance et les moyens des duos en lice. Il faudra attendre jusqu’au septième concurrent, Yuri Mansur, pour que se produise le premier sans faute. À mi-chemin de la première manche, seul un autre cavalier a réussi à faire de même. Sans surprise, le sans faute suivant nous vient de Scott Brash, seul cavalier à avoir jamais remporté le Rolex Grand Slam of Show Jumping. Le Britannique était aujourd’hui accompagné de sa jument Hello Chadora Lady.

Le Français Simon Delestre, ancien numéro un mondial et médaillé de bronze par équipes aux Jeux olympiques de Paris 2024 l’été passé, montre ensuite l’ampleur de son talent en inscrivant son nom sur la liste des cavaliers qualifiés pour le barrage. Déception par contre pour le Belge Pieter Devos : une malheureuse pénalité de temps lui interdit d’aller plus loin.

Après le passage de trente chevaux, aucun Hollandais n’a encore signé de sans faute. Le champion en titre Willem Greve se présente alors sur la piste, mais en dépit d’un coup de saut impressionnant, sa monture Grandorado TN N.O.P. fait la faute sur le onzième obstacle, un fin vertical marron qui a déjà posé des difficultés. Venus en grand nombre pour voir sauter les cavaliers néerlandais, les spectateurs seront déçus : Harrie Smolders, puis Maikel van der Vleuten, ne parviennent pas à déjouer les complexités du parcours, et les Pays-Bas ne seront donc pas représentés lors du barrage.

Smolders écope de quatre points sur le double aux tulipes qui au total coûtera 16 pénalités aux cavaliers dans cette première manche. Le Belge Gilles Thomas, qui jusqu’à aujourd’hui n’avait fait aucune fausse note lors d’une première manche de Majeur, faute au même endroit, tout comme Kent Farrington, Lillie Keenan et Julien Epaillard, pourtant parmi les favoris.

Aucun autre cavalier ne réussit à produire la performance souhaitée, et ce ne sont donc que trois couples qui finissent par se qualifier pour le barrage. Les cavaliers se présentant à la phase finale dans le même ordre qu’à la manche précédente, c’est le Brésilien Yuri Mansur qui pénètre en premier sur la piste légendaire. Il établit un chrono rapide de 43’08 seulement, mais fait tomber le dernier oxer Rolex et laisse ainsi la porte ouverte aux deux autres concurrents. Deuxième à s’élancer, Brash prend lui aussi quatre pénalités, mais prend la tête provisoire de l’épreuve en battant son concurrent au chrono. Derniers en lice, Delestre et Cayman Jolly Jumper produisent le seul double sans faute de l’épreuve et finissent ainsi par remporter le Majeur du Rolex Grand Slam of Show Jumping. Une première non seulement pour le cavalier, mais aussi pour la France.

Pour Delestre, « c’est un formidable résultat. Je suis fou de joie d’avoir gagné le prestigieux Rolex Grand Prix avec Cayman Jolly Jumper, le meilleur cheval que j’ai jamais monté. Il y a deux ans, nous avions fait tomber le dernier obstacle au barrage, mais c’était notre meilleur résultat dans cette épreuve jusque-là. Aujourd’hui, nous en sommes sortis vainqueurs ! C’est mérité pour ce cheval dont je suis très fier. Aujourd’hui, sur un parcours pourtant difficile, il a sorti toutes ses cartes, et je suis ravi ! »

ENTRETIEN AVEC MEL THIJSSEN

Photo Credits : Rolex Grand Slam - Sofya Khizhik Photo Credits : Rolex Grand Slam - Sofya Khizhik

Nous sommes au Dutch Masters, votre Majeur à domicile. Qu’est-ce que ce lieu a de particulier pour vous ?

C’est vraiment génial d’être ici, c’est l’une des plus grandes compétitions, non seulement en Hollande, mais sur notre calendrier. C’est une chance incroyable de concourir ici dans la catégorie cinq étoiles. Je montais des poneys ici quand j’étais enfant, mais c’est ma première fois au plus haut niveau.

L’atmosphère et le public sont sensationnels. Je suis toujours motivée, mais mon public me donne ce petit plus car je veux donner le meilleur de moi-même pour eux.

Quelle préparation suivez-vous pour un concours comme le Dutch Masters ?

C’est une préparation qui demande beaucoup d’investissement mais qui n’est pas aussi compliquée que nous pourrions le penser. L’aspect le plus important est de garder les habitudes des chevaux, et c’est moi qui les connais le mieux ! L’un de mes chevaux a concouru la semaine dernière pour être au meilleur de sa forme tandis qu’un autre a eu une semaine plus calme à la maison. Chaque cheval est différent, vous devez donc faire un programme qui soit le plus efficace pour chacun. Nous essayons de ne pas trop les changer.

Vous faisiez partie de la Rolex Young Riders Academy, soutenue par Rolex. Qu’est-ce cela a représenté pour vous, et qu’avez-vous appris de cette expérience ?

L’académie a été un soutien incroyable. Ils sont très accessibles et je peux facilement leur demander conseil. Ils m’ont donné la chance de concourir ici et ils m’ont aidée à tout gérer, depuis mes chevaux jusqu’à mes réseaux sociaux. Ils sont toujours prêts à aider !

Vous venez d’une dynastie du concours hippique, qu'est-ce que cela fait de concourir au plus haut niveau avec vos frères et sœurs ?

Nous sommes tous habitués à ce mode de vie. Mon frère, ma sœur et moi avons tous choisi cette voie, on ne nous y a jamais poussés. Nous avons tous nos propres projets et nos carrières, et nos chevaux sont très différents.

Je dirais que je suis très semblable à mon frère. Nous sommes au même niveau et nous concourons dans les mêmes catégories de compétitions. Nous travaillons ensemble, nous nous demandons conseil et nous nous aidons mutuellement autant que-possible.

En dehors de votre famille, quels cavaliers admirez-vous ?

Il n’y a pas un cavalier que j’admire en particulier, j’en admire beaucoup, car chacun a son propre style. J’essaye d’apprendre d’eux, de prendre des astuces des plus grands cavaliers et de les intégrer à mon style. Je pense qu’il ne faut pas copier qui que ce soit mais qu’il faut essayer d’être soi-même.

Que représente le Rolex Grand Slam of Show Jumping pour une jeune cavalière comme vous ?

C’est le plus haut niveau de ce sport, tous les cavaliers rêvent de concourir aux Majeurs. Pouvoir participer ici à l’un de ces événements est une immense chance pour moi. C’est une référence dans la carrière d’un cavalier, si vous concourez dans l’un des Majeurs du Rolex Grand Slam, c’est une preuve du niveau que vous avez atteint dans la discipline.

Quelle importance revêt l’équipe qui vous entoure dans votre succès ?

Une importance énorme ! Ils sont les pièces du puzzle qui permettent à l’ensemble de fonctionner. Le succès d’un cheval tient à beaucoup plus qu’au seul cavalier, toute l’équipe, et tout particulièrement les grooms, est absolument essentielle.

Mon groom connaît tellement bien mon cheval qu’il détecte le moindre changement. En tant que cavaliers, nous ressentons l’état de nos chevaux, mais les grooms les comprennent profondément. C’est un tout qui travaille ensemble pour rendre le succès possible.

Quelles sont les qualités requises d’un cheval et d’un cavalier pour gagner un Majeur du Rolex Grand Slam ?

La confiance mutuelle est essentielle. Le cheval doit avoir de bons moyens, un bon mental et la capacité de penser par lui-même. Il faut aussi que le cheval aime « jouer », qu’il ait envie d’aller vers l’obstacle et qu’il soit naturellement rapide dans les barrages.

 

ENTRETIEN AVEC MADELENE NORD

Madde Nord, Peder Fredericsonís groomat the Dutch Masters 2025 Photo Credits : Rolex Grand Slam / Helen Cruden

Pourriez-vous d’abord vous présenter et nous dire quel est votre métier ?

Je m’appelle Madelene et je travaille comme groom de concours pour Peder Fredricson. Je suis suédoise, j’apprécie donc de pouvoir travailler à nouveau pour un cavalier suédois. Auparavant, j’ai travaillé pour Marco Kutscher en Allemagne pendant six ans.

Comment votre carrière a-t-elle commencé ?

Je monte à cheval depuis que je suis toute petite, c’est ma mère qui m’a fait commencer. La Suède a une importante culture équestre, avec beaucoup de cavaliers et de chevaux, pas forcément au plus haut niveau, mais ils sont de plus en plus nombreux à y arriver. Je jouais aussi beaucoup au football, je me partageais donc entre ces deux sports. Pendant mes trois dernières années d’école, je me suis consacrée aux études dans l’équitation.

Le frère de Marco, qui vivait en Suède à l’époque, m’a aidée à débuter dans la discipline en m’emmenant aux concours. C’est ce qui m’a conduite à travailler avec Marco, ce qui a constitué une formidable expérience. En bref, les chevaux font partie de ma vie depuis aussi longtemps que je m’en souvienne.

Comment établissez-vous un lien avec vos chevaux ?

C’est difficile à expliquer mais, au final, il faut être avec eux et passer du temps avec eux dans différentes situations. Cela permet de comprendre comment ils vont réagir et de s’adapter à eux.

Nous sommes là pour les chevaux, et notre travail consiste à apprendre comment ils se comportent, ce qu’ils aiment et ce qu’ils n’aiment pas. Le seul moyen d’y parvenir est de passer beaucoup de temps avec eux.

Que faites-vous pour vous assurer que les chevaux soient au top de leur forme aux dates clés du calendrier équestre ?

J’essaye de maintenir leurs habitudes, en tout cas aussi proches que possible de ce qu’ils vivent chez eux. Bien entendu, pour les compétitions, certaines choses doivent être adaptées en fonction du programme des épreuves, mais il est très important de maintenir la routine familière comme les heures des repas. Il est aussi crucial de les faires sortir des écuries, mais aussi de leur laisser suffisamment de temps pour se reposer.

J’ai travaillé avec de nombreuses personnes expérimentées qui m’ont beaucoup appris. Les chevaux sont des animaux routiniers, et s’il y a trop de changements, les choses peuvent mal se passer. Plus vous passez de temps avec votre cheval, mieux vous le comprendrez et plus vous remarquerez les petits détails qui peuvent faire la différence.

Que pouvez-vous nous dire sur votre piquet de chevaux actuel ?

Cette semaine nous avons avec nous Hansson WL et Catch Me Not S. Catch Me Not S a 19 ans et Hansson WI a 17 ans, c’est donc la vieille garde qui est là. Mais ils sont vraiment en forme et c’est tellement sympa de les faire sortir, ils ont beaucoup de personnalité et ils connaissent bien les concours. Dès qu’ils voient qu’on prépare le camion et qu’ils montent dedans, ils savent exactement ce qui se passe.

Catch Me Not S n’est pas des plus faciles dans les concours, il peut être brusque et vif, mais il aime vraiment aller en concours, tandis que Hansson WL est un peu plus détendu et d’humeur plus facile.

Il est difficile d’expliquer leurs personnalités car nous en connaissons un certain aspect en les côtoyant tout le temps, tandis que d’autres gens voient un autre aspect sur le terrain en concours. Mais au final ce sont des chevaux adorables.

Quelles sont les qualités de Peder qui en font un si bon cavalier ?

Il veut toujours s’améliorer et évoluer, il cherche constamment des petites choses à faire pour améliorer sa performance et il est toujours ouvert pour essayer de nouvelles choses. Sa mentalité est l’une de ses plus grandes forces. Il ne pense jamais, ça a bien marché, il ne faut rien changer, mais il cherche toujours de nouveaux moyens de progresser.

À l’entraînement, il travaille beaucoup sur le terrain, en manipulation et à la longe, ce qui fait une grande différence. C’est grâce à cet état d’esprit qu’il est au plus haut niveau depuis si longtemps, il cherche toujours à s’améliorer et à trouver de nouveaux moyens de rester au meilleur niveau.

Que ressentez-vous lorsque vous êtes présente au Dutch Masters ? Comment trouvez-vous les installations pour vous-même et vos chevaux ?

C’est très bien car il y a beaucoup d’espace pour nous et pour les chevaux, nous avons de la place pour bouger. Les terrains sont vastes et bien entretenus, et tout est à proximité, nous pouvons donc sortir et visiter les boutiques et profiter de l’événement.

C’est une très grande compétition, l’une des plus importantes sur notre calendrier. Avant même notre arrivée, il y a beaucoup de travail de fait pour que tout soit dans les meilleures conditions quand nous arrivons.

Qu’est-ce qui fait la particularité des Majeurs du Rolex Grand Slam of Show Jumping ?

Ils sont toujours extrêmement bien organisés et ils travaillent constamment pour s’améliorer et se perfectionner. La plus grande différence est que tous les grands cavaliers veulent y aller, pas seulement pour concourir, mais pour gagner.

Il y a toujours quelque chose de très spécial dans ces événements. Le jour du Grand Prix, l’ambiance est incroyablement intense, ce qui rend les choses passionnantes car la tension est palpable. Tout doit être parfait pour obtenir une victoire dans un Majeur.

Quels conseil donneriez-vous à quelqu’un qui voudrait être un groom de haut niveau ?

Je lui dirais de foncer ! De ne pas avoir peur de faire des erreurs, et d’apprendre de ceux qui ont plus d’expérience. Tout le monde fait des erreurs, ça fait partie du processus d’apprentissage. Pour les jeunes grooms, je leur conseillerais de continuer leurs efforts. Ça ne sera pas toujours parfait, mais les efforts et la détermination seront la preuve que vous voulez vraiment y arriver.

Cela prend du temps, je travaille depuis de nombreuses années. Mais si vous aimez les chevaux et que vous êtes passionné dans votre travail, vous y arriverez.