Dans les coulisses du CHIO Aachen 2024 : Mercredi 3 Juillet 2024

VOGEL VICTORIEUX AU TURKISH AIRLINES-PRIX D'EUROPE

Photo credits : Rolex Grand Slam / Ashley Neuhof Photo credits : Rolex Grand Slam / Ashley Neuhof

C’est sous les feux scintillants du stade principal du CHIO d’Aix-la-Chapelle que quarante-cinq des plus grands couples au monde sont entrés en piste dans l’espoir de décrocher le Prix de l’Europe Turkish Airlines, épreuve phare de ce mercredi. Cette épreuve était également la première opportunité pour les cavaliers de se qualifier pour l’emblématique Rolex Grand Prix de dimanche. 

Comme il est souvent le cas lors du World Equestrian Festival, le casting était plus que prestigieux, avec notamment Ben Maher et Steve Guerdat, champions olympiques et champions d’Europe en individuel, ainsi que Willem Greve, Prétendant actuel au Rolex Grand Slam of Show Jumping, aux rênes de son étalon Highway TN N.O.P. avec qui il a remporté le Rolex Grand Prix du Dutch Masters plus tôt dans l’année.

Premier auteur d’un sans faute sur le parcours complexe à 14 combinaisons imaginé par Frank Rothenberger, l’Allemand Rene Dittmer écope malheureusement de deux pénalités de temps.

Just Be Gentle, sous la selle de Christian Kukuk, très en forme en ce moment, est le cinquième à fouler la célèbre piste. Il fait le bonheur du public en signant le premier sans faute dans les limites de temps imposées. Deux concurrent plus tard, l’Irlandais Cian O’Connor fait de même et assure ainsi le barrage, pour le plus grand plaisir de la foule de passionnés du CHIO d’Aix-la-Chapelle. Par la suite, d’autres sans faute se succèdent : six couples allemands se qualifient notamment pour la deuxième manche, dont Richard Vogel, vainqueur du Rolex Grand Prix du CHI de Genève en 2023. Yuri Masur, l’air bien décidé à renouveler sa victoire de l’an passé, signe un sans faute impeccable sur QH Alfons Santo Antonio. L’Américain McLain Ward, gagnant en 2022, se qualifie lui aussi.

Sur les 45 cavaliers en lice au départ de l’épreuve, 12 réussissent à se qualifier, dont de nombreux couples très rapides. Le barrage promet donc d’être exaltant. Les cavaliers se présentent alors en ordre inverse au classement de la première manche, et c’est Thibeau Spits qui se lance en premier sur la version raccourcie du parcours. Mais déception : le jeune cavalier belge laisse une barre au sol à deux reprises. Deuxième au départ, Christian Kukuk montre la voie au reste des cavaliers avec un sans faute en 48,48 secondes, un chrono pourtant vite éclipsé par son compatriote Patrick Stühlmeyer.

McLain Ward tient alors la foule en haleine tout au long de son passage sur Callas, sa jument de 16 ans, pour prendre la tête de l’épreuve avec deux secondes d’avance, un chrono impressionnant et qui semble dur à battre. Guerdat, qui a déjà à son actif trois Majeurs du Rolex Grand Slam of Show Jumping, fait croire un instant qu’il en est capable, mais échoue à l’avant-dernier obstacle.

Le public allemand a enfin l’occasion d’exulter lorsque Richard Vogel, aux rênes de Cepano Baloubet, boucle le parcours en 42,44 secondes et s’adjuge la première place provisoire. Aucun des trois couples restants ne réussissant à montrer le même mélange de précision et de vitesse, Vogel s’impose dans son premier Prix de l’Europe Turkish Airlines et décroche dans le même temps sa deuxième victoire 5* de la journée.
Interviewé après sa victoire, l’Allemand nous raconte son émotion : « Mon cheval [Cepano Baloubet] a extraordinairement sauté ce soir, il est en top forme et a vraiment tout donné pour moi aujourd’hui. Les projecteurs, les spectateurs... rien ne vaut l’ambiance de ce lieu. La semaine démarre bien pour moi ! »

Interview avec Frank Rothenberger

Photo credits : Rolex Grand Slam / Ashley Neuhof Photo credits : Rolex Grand Slam / Ashley Neuhof

Qu’est-ce qui fait selon vous la particularité du CHIO d’Aix-la-Chapelle ?

Le CHIO d’Aix-la-Chapelle est le plus grand concours équestre au monde, et son Rolex Grand Prix l’une des épreuves les plus difficiles du monde du saut d’obstacles. Beaucoup d’attentes pèsent sur moi en tant que chef de piste du CHIO d’Aix-la-Chapelle, car les parcours doivent être dessinés selon des critères très précis pour avoir les résultats escomptés.

 

Une fois encore, les meilleurs chevaux et cavaliers sont présents cette année. Certains de ces chevaux, déjà qualifiés pour le Rolex Grand Prix, ne participeront qu’à cette épreuve dimanche. D’autres préqualifiés participeront à une autre épreuve cette semaine, et de nombreux autres couples devront se qualifier pour l’épreuve lors de l’épreuve de la Coupe des Nations Mercedes-Benz ou du Prix de l’Europe Turkish Airlines.

 

Avec mes collègues chefs de piste, nous planifions le parcours du Rolex Grand Prix plusieurs semaines en amont, puis nous regardons avec intérêt les épreuves qui le précédent, pour voir comment les chevaux évoluent et s’il faut changer certains détails. Cette année, les cavaliers sont très bien préparés et peuvent utiliser les épreuves de la semaine pour donner confiance à leurs chevaux en vue du Rolex Grand Prix de dimanche.

 

Parlez-nous un peu du parcours que vous avez créé pour le Rolex Grand Prix ce dimanche...

C’est un 1,60 m (la hauteur maximale autorisée) qui comprendra notamment des oxers de 1,80 m de large. Il y aura aussi un double fossé le long du bassin, une tradition du Rolex Grand Prix du CHIO d’Aix-la-Chapelle, ainsi qu’une rivière. Au total, quarante chevaux participeront à la première manche, dix-huit à la deuxième, et avec un peu de chance le barrage aura cinq ou six participants ayant signé un sans faute. 

 

Quels sont les principaux points à prendre en compte et les objectifs à atteindre lorsqu’on dessine un parcours ?

Le premier enjeu est la sécurité : il faut s’assurer que rien n’arrive aux chevaux. C’est une épreuve difficile, il faut donc faire particulièrement attention à la distance qui sépare les obstacles et aux matériaux utilisés. Beaucoup des obstacles sont d’une couleur unie, par exemple blancs ou en bois naturel, pour éviter l’excès de couleurs contrastées. Le Rolex Grand Prix du CHIO d’Aix-la-Chapelle a une envergure particulière par rapport aux autres Grands Prix du monde. La piste est énorme et les cavaliers aiment bien ça.

 

Si vous pouviez monter n’importe quel cheval au Rolex Grand Prix de dimanche, qui choisiriez-vous ?

Par le passé, on avait peut-être dix ou douze gagnants potentiels sur les quarante couples qui prenaient part au Rolex Grand Prix. Mais de nos jours, je pense que vingt-cinq, trente, peut-être même quarante cavaliers pourraient l’emporter dans cette épreuve. C’est donc difficile de choisir, car il y a de nombreux chevaux de premier rang.

 

Quelle importance revêt votre équipe dans la construction d’un parcours réussi ?

J’ai déjà trois assistants chefs de piste qui m’accompagnent, ainsi qu’un autre membre de l’équipe qui produit les dessins du parcours, et trois personnes qui organisent l’entreposage des éléments. En tout, c’est une grosse équipe de plus de cinquante personnes. Une bonne chose, car nous devons construire les parcours pendant la nuit sous les projecteurs, pour qu’ils soient prêts le lendemain.

 

Quel est le parcours dont vous êtes le plus fier ? 

Celui que j’ai imaginé pour les Championnats du monde FEI 2006. Sur ce parcours, une barre est tombée au moins une fois sur chaque obstacle : une vraie réussite pour un chef de piste ! Le parcours que j’ai conçu pour la Finale de la Coupe du monde FEI à Riyadh cette année était aussi très réussi.

 

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui se lance dans le métier de chef de piste ?

C’est utile d’avoir été soi-même cavalier, pour avoir une idée instinctive du tracé et du bon placement des obstacles. Les chefs de piste en herbe devraient commencer par des concours locaux, puis choisir un ou deux professionnels qu’ils souhaiteraient accompagner. Pour arriver au plus haut niveau, il faut bien 15 à 20 ans. Pour avoir une chance de dessiner un jour des parcours 5*, il est donc conseillé de se lancer dans le métier avant la trentaine. Ma fille par exemple m’accompagne mais assiste également plusieurs autres chefs de piste, pour apprendre le maximum de choses.

 

Le Rolex Grand Slam of Show Jumping est le nec plus ultra en matière de saut d’obstacles. Vous passionnez-vous pour d’autres sports, et ceux-ci vous inspirent-ils dans votre travail ?

Je fais de la voile, un sport très différent du saut d’obstacles ! J’ai navigué aux quatre coins du monde : sur la Méditerranée, aux Seychelles, en Thaïlande, partout ! J’ai arrêté ma carrière de cavalier à 21 ans, pour lancer mon entreprise de chef de piste l’année suivante, un métier que je continue encore aujourd’hui d’exercer.

 

Le Rolex Grand Slam of Show Jumping est né en 2013, et son premier Majeur a eu lieu ici-même, à Aix-la-Chapelle. À votre avis, quel a été l’impact du Grand Slam sur le monde du saut d’obstacles ?

Rien ne vaut le Rolex Grand Slam of Show Jumping pour un cavalier. Je me souviens de 2015, lorsque Scott Brash a remporté trois Majeurs successifs : tout d’abord le Rolex Grand Prix du CHI de Genève en décembre 2014, puis celui du CHIO d’Aix-la-Chapelle, et enfin celui du CSIO Spruce Meadows ‘Masters’ de Calgary. Sa victoire au Rolex Grand Slam of Show Jumping lui a valu une somme d’argent considérable. Depuis, tous les cavaliers cherchent à répéter cette prouesse. 

Interview avec Anthony Philipaerts

Photo credits : Dirk Caremans / Hippofoto Photo credits : Dirk Caremans / Hippofoto

Vous faites déjà une belle carrière. Quel a été votre plus grand moment de fierté professionnel ?

Le plus beau moment de ma carrière jusqu’ici est lorsque nous avons remporté la médaille d’or par équipe durant ma dernière compétition Junior en 2021, aux Championnats d’Europe FEI Jeunes cavaliers de Vilamoura. Je suis extrêmement fier de cette victoire. Une médaille d’or aux Championnats d’Europe ou du monde, c’est le rêve de tout cavalier.

 

Vous venez d’une famille de cavaliers professionnels. Quel est le meilleur conseil que vous ayez reçu de votre père et de vos frères ?

Ce n’est pas toujours facile de suivre mon père et mes frères, mais le meilleur conseil qu’ils m’aient donné est de me concentrer sur mes propres efforts et de tracer mon chemin à moi. Mais c’est bien sûr utile de suivre leur parcours, et c’est super de savoir que je peux leur demander conseil si besoin. 

 

Le public attend-il de vous de rencontrer le même succès que votre père ou vos frères ?

Effectivement, il y a une certaine attente !  Mon père a décroché énormément de victoires dans sa carrière, et mes frères font maintenant un parcours très réussi. Mais eux n’attendent rien : c’est plutôt moi qui me mets la pression ! Je fais de mon mieux pour ne pas trop y penser et pour rester concentrer sur mon propre parcours.

 

En dehors de votre famille, quels cavaliers admirez-vous ?

En dehors de mon père, j’admire beaucoup Ludger Beerbaum, qui est resté en tête des classements pendant très longtemps. Parmi les cavaliers actuels, je dirais Henrik von Eckermann, qui a été formé chez Ludger Beerbaum, et Jeroen Dubbledam. Tous deux ont remporté de nombreux championnats. Pour moi, ce sont deux exemples à suivre dans le saut d’obstacles actuel.

 

Qu’est-ce qui vous donne envie de réussir et de gagner ?

C’est la dernière année que je peux concourir en tant que jeune cavalier, et je n’ai pas les chevaux nécessaires pour gagner. Mais je pense que ça me donne encore plus envie de réussir. J’ai quelques jeunes chevaux très prometteurs qui m’accompagneront dans ma transition vers la compétition Seniors. Je vais faire tout ce que je peux pour atteindre le plus haut niveau, dans le but de participer un jour au Rolex Grand Prix du CHIO d’Aix-la-Chapelle.

 

Parlez-nous un peu des chevaux dont vous vous occupez en ce moment.

J’ai plusieurs chevaux de huit ans, comme Gabell D’arvor, que je monte cette semaine. Il a encore du chemin à faire, mais il est très prometteur. Au total, je monte quatre chevaux de huit ans et un de sept ans. C’est un bon piquet, mais je dois encore me montrer patient pour développer leur talent.

 

Le CHIO d’Aix-la-Chapelle est le deuxième Majeur du Rolex Grand Slam of Show Jumping de 2024. Pouvez-vous nous expliquer l’importance de ce concours ?

J’ai participé au CHIO d’Aix-la-Chapelle pour la première fois l’an passé, dans la catégorie des moins de 25 ans, et la première chose que j’ai dite, c’est que je voulais y retourner. L’émotion que l’on ressent lorsqu’on foule la piste d’Aix-la-Chapelle est indescriptible. C’est la plus belle piste du monde. Je viens ici chaque année depuis longtemps, pour voir mes frères et mon père participer aux grosses épreuves, alors c’est extraordinaire pour moi de concourir une fois encore ici.

 

Que représente le Rolex Grand Slam of Show Jumping pour un jeune cavalier comme vous ?

C’est l’une des épreuves ultimes de notre sport, qui a lieu durant le plus beau concours au monde. L’atmosphère des Majeurs du Rolex Grand Slam of Show Jumping est phénoménale. Ces concours attirent les meilleurs couples cheval-cavalier au monde. Participer à un Majeur du Rolex Grand Slam of Show Jumping était mon plus grand rêve.

 

En dehors du saut d’obstacle, quels autres sports vous intéressent ?

J’adore regarder le foot, et je suis un peu la Formule 1. Je joue parfois au padel avec mes amis. Plus jeune, j’ai aussi beaucoup joué au foot, mais à un moment donné j’ai dû choisir entre ça et l’équitation, et j’ai choisi l’équitation.

 

Êtes-vous superstitieux en compétition ?

Pas vraiment. J’essaie juste de garder les mêmes habitudes pour que ma préparation et celle de mes chevaux restent homogènes.